L'Assemblée vote la suppression de la redevance, en préambule d'un week-end agité
L'Assemblée nationale a voté samedi matin la suppression de la redevance audiovisuelle dans le cadre du soutien au pouvoir d'achat, mais doit encore déminer des points très débattus comme la remise carburant, la renationalisation d'EDF ou les "superprofits" des grands groupes.
La suppression de la redevance qui finance l'audiovisuel public, une promesse du président Macron, suscite de nombreuses inquiétudes sur l'indépendance et le financement à venir des médias concernés.
Elle a été votée par 170 voix contre 57, lors de l'examen en première lecture du projet de loi de finances rectificative pour 2022 (PLFR). LR et RN ont voté pour, et l'alliance de gauche Nupes à l'unanimité contre.
Des amendements de la majorité et de LR ont été adoptés pour affecter "une fraction" de la TVA, pour un montant d'environ 3,7 milliards d'euros, dans le but de répondre aux inquiétudes sur le financement de ce secteur.
Lors de cette séance souvent agitée, le ministre des Comptes publics Gabriel Attal a exprimé son attachement à "un audiovisuel public fort", tout en qualifiant "d'obsolète" cette redevance basée sur la possession d'un téléviseur à l'heure des tablettes et autres smartphones. La redevance est actuellement fixée à 138 euros par an en métropole.
Les principales objections sont venues des rangs de la Nupes.
Pour Inaki Echaniz (PS), cette suppression est une "mauvaise idée" qui va nuire à un financement stable. Alexis Corbière (LFI) a souligné que garantir "l'indépendance de l'audiovisuel public est une condition de la démocratie".
La ministre de la Culture Rima Abdul Malak a en revanche fait valoir que "ce n'est pas la redevance qui garantit l'indépendance" mais l'Arcom (ex-CSA), l'instance qui nomme les dirigeants de l'audiovisuel public.
La gauche a également accusé le gouvernement de s'inspirer de l'extrême droite pour à terme démanteler l'audiovisuel public. "Zemmour et Mme Le Pen l'avaient demandé, M. Macron l'aura fait", a lancé le communiste Stéphane Peu.
Mme Le Pen a toutefois estimé que "le projet du gouvernement n'a rien à voir avec ce que nous voulons faire", à savoir une "privatisation" en bonne et due forme.
Après quatre jours de débats houleux sur le projet de loi en faveur du pouvoir d'achat, les députés sont aux prises depuis vendredi, via le PLFR, avec le deuxième volet des mesures destinées à contrer les effets de l'inflation.
La discussion doit se poursuivre jusqu'à samedi soir, voire dimanche ou lundi.
Le camp présidentiel, privé de majorité absolue, doit fréquemment chercher des appuis au coup par coup face aux assauts parfois conjugués des oppositions.
" Superprofits" -
"On n’a pas le monopole des bonnes idées", a déclaré samedi au Parisien la ministre des PME Olivia Grégoire, pour qui la "nouvelle configuration de l’Assemblée fait bouger le gouvernement dans sa façon de se préparer et c’est très bien ainsi".
L'appui de LR est ainsi espéré pour faire adopter ce projet de budget sans devoir compter sur les voix du RN.
Outre la suppression de la redevance, le budget rectificatif comprend la poursuite de la remise carburant et du bouclier tarifaire sur l'énergie, la revalorisation du point d'indice des fonctionnaires et le financement de l'OPA pour renationaliser EDF.
La pression s'accentue aussi, jusque dans la majorité, pour taxer les "superprofits" des grands groupes.
TotalEnergies a opportunément annoncé vendredi des remises à la pompe à partir de septembre, mais ce geste est jugé insuffisant à gauche et par certains membres de la majorité et du RN.
Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire se montre quant à lui ouvert aux propositions de la droite, de relever l'aide de l'Etat sur les carburants, actuellement à 18 centimes le litre.
Les députés ont déjà approuvé vendredi une hausse du plafond de défiscalisation des heures supplémentaires, ainsi que la possibilité pour les entreprises de racheter aux salariés les jours de RTT auxquels ils auraient renoncé.
L'Assemblée a voté également un doublement de l'aide défiscalisée des entreprises aux salariés pour leurs frais de carburant (de 200 à 400 euros), et validé une mesure favorable à la hausse des titres restaurant.
A.Gonzalez--LGdM