Alsace: opération escargot contre un projet de taxe poids lourds
Plusieurs dizaines de routiers ont mené lundi une opération escargot pour protester contre un projet de taxe poids lourds que l'Alsace souhaite instaurer à partir de 2027 afin de faire baisser le trafic de transit sur la principale autoroute du secteur.
Deux convois sont partis peu avant 09H00, un de Mulhouse (Haut-Rhin) et un de Strasbourg (Bas-Rhin), pour se retrouver à Colmar, escortés par la police.
Une cinquantaine de camions ont formé le convoi parti de Strasbourg sous la pluie. Plusieurs chauffeurs avaient installé des banderoles sur leur cabine, sur lesquelles on pouvait lire "Non à un nouvel impôt" ou "Si vous l'avez c'est qu'un camion vous l'a apporté. S'il est taxé, vous le payez". Le convoi parti du Haut-Rhin a compté lui aussi une cinquantaine de poids lourds.
Les deux rassemblements ont créé quelques kilomètres de bouchons sur l'autoroute A35, sans que la situation ne soit catastrophique.
Dans le viseur des routiers, la taxe poids lourds sur laquelle la Collectivité européenne d'Alsace - issue de la fusion en 2021 des conseils départementaux du Bas-Rhin et du Haut-Rhin - doit se prononcer le 21 octobre: un péage que devront payer les camions en fonction de la distance parcourue sur certains axes.
Selon le Collectif pour la compétitivité de l'économie alsacienne (CCEA), "ce ne sont pas seulement les transporteurs qui s'opposent fermement à cette mesure, mais bien l'ensemble des filières économiques d'Alsace, qui sont vent debout face à cette taxe. Tous les secteurs, quels qu'ils soient, seront gravement impactés et ce, bien au-delà du secteur du transport, jusqu'au pouvoir d'achat des consommateurs".
La Collectivité européenne d'Alsace prévoit d'instaurer cette taxe sur les poids lourds de plus de 3,5 tonnes à partir de début 2027 sur l'autoroute A35 qui traverse la région du nord au sud. En raison d'une fiscalité onéreuse sur les autoroutes allemandes, un flux important de camions effectue le détour par l'Alsace. Avec cette taxe, qui serait d'un montant d'environ 15 centimes par kilomètre, le président de la collectivité Frédéric Bierry entend "rééquilibrer le trafic de transit des poids lourds".
M. Bierry pointe l'augmentation de la pollution, des bouchons, des accidents et la détérioration de la chaussée.
La taxe rapporterait 64 millions d'euros par an, payés pour plus de la moitié par le trafic de transit et non par les Alsaciens, avait souligné vendredi M. Bierry, précisant que des dérogations permettraient d'exonérer différentes branches et qu'une partie des recettes serait réinjectée pour soutenir l'économie locale.
Le président de la Collectivité européenne d'Alsace a rencontré lundi matin plusieurs acteurs économiques à Colmar pour discuter de ce dossier, mais ceux-ci sont sortis déçus de cette réunion de près de trois heures.
Le CCEA, qui demandait "a minima" un report de six mois de la décision, n'a pas été entendu. "Le vote est maintenu au 21 octobre et M. Bierry n'a pas changé un iota" au texte prévu, a rapporté Brigitte Kempf, co-présidente de la section Alsace de la Fédération nationale des transporteurs routiers (FNTR).
L'issue de cette réunion "me fait penser à l'expression: il n'y a pas plus sourd que celui qui ne veut pas entendre", a critiqué Jean-Luc Heimburger, président de la Chambre de commerce et d'industrie Alsace Eurométropole, estimant que le report "aurait permis de continuer à travailler pour voir toutes les conséquences pour l'économie alsacienne, car plus d'une entreprise y laissera sa peau", selon lui.
L.A. Beltran--LGdM