Feu vert au Parlement pour la loi industrie verte
La loi industrie verte a abouti mercredi au Parlement avec l'adoption définitive par les sénateurs de ce texte qui entend réindustrialiser la France tout en favorisant la décarbonation, malgré le scepticisme d'une partie de l'opposition.
Le Parlement a fait "un pas important qui nous amène sur la voie de la réindustrialisation verte", a savouré le ministre de l'Industrie Roland Lescure sur les bancs du Sénat. Le vote a été large dans l'hémicycle, à 243 voix pour et 17 voix contre, celles du groupe écologiste. L'Assemblée nationale en avait fait de même mardi soir.
"Ce projet de loi inédit permettra à la France de se positionner comme le futur leader européen de l'industrie verte et le terreau des technologies vertes de demain", a affirmé le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, au bout d'une dizaine de mois de travaux menés entre Bercy, l'Assemblée nationale et le Sénat.
Hasard du calendrier ou agenda minutieusement préparé, M. Le Maire a d'ailleurs ouvert mercredi à Paris le premier "forum de Paris de la décarbonation", réunissant industriels, dirigeants de fonds d'investissement et banquiers.
Les thèmes de l'événement rejoignent ceux du texte de loi, emblématique pour l'exécutif qui souhaite "mettre fin à la désindustrialisation massive" qu'a connue la France.
L'un de ses objectifs principaux sera d'accélérer la réindustrialisation du pays, avec l'objectif de "diviser par deux", selon le gouvernement, les délais d'implantations d'usines, aujourd'hui estimés à 17 mois.
Il s'agit également d'encourager le déploiement de grandes technologies de décarbonation, celles du "big five" - éolien, photovoltaïque, pompes à chaleur, batteries, hydrogène décarboné.
Toujours dans une optique de simplification, certains grands projets dits "d'intérêt national majeur" bénéficieront d'une procédure d'exception qui donne la main à l'Etat... Tout en associant, en amont, les collectivités territoriales et notamment les communes d'implantation, un dispositif cher au Sénat et validé tard lundi soir après des négociations entre députés et sénateurs.
- "Contours flous" -
Côté financement, l'exécutif mise sur l'épargne privée (épargne retraite, assurance-vie) et prévoit dans cette loi le lancement d'un nouveau produit destiné aux plus jeunes, le "plan épargne avenir climat", débloqué à la majorité de l'épargnant et après cinq ans d'épargne.
Plusieurs inconnues subsistent néanmoins et seront débattues dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024 ces prochaines semaines au Parlement, notamment sur les contours d'un crédit d'impôt en faveur des entreprises qui investissent dans les industries vertes. Une mesure déjà ciblée par de multiples amendements à l'Assemblée.
"Ce projet de loi reste au milieu du gué", a regretté le sénateur (Union centriste) Patrick Chauvet, pour qui "le véritable rendez-vous sera le projet de loi de finances", débattu ces prochaines semaines au Parlement.
Pour le député PS Gérard Leseul, dont le groupe s'est abstenu, "ce texte manque cruellement d'ambitions" en raison de ses "contours flous" entre "greenwashing" et "verdissement de l'économie".
"Ce projet industrie verte a accouché d'une souris grise", a dénoncé le sénateur écologiste Daniel Salmon, qui attendait "une industrie inscrite dans une vraie transition écologique pensée sur le long terme".
Autre point de vigilance des parlementaires, le fléchage à confirmer des moyens destinés à la réhabilitation des friches industrielles: "Il ne faut pas que les collectivités restent avec la charge de remettre en état des friches qui leur resteraient sur les bras", pointe le rapporteur (Les Républicains) au Sénat Laurent Somon.
Sur ce volet, M. Le Maire s'est engagé à ce que la Banque des territoires investisse "un milliard d'euros pour aménager 50 sites de 2.000 hectares clés en main".
La loi ne comportera pas, en revanche, un dispositif très commenté qui avait été ajouté par l'Assemblée au coeur de l'été contre l'avis du gouvernement, celui des résolutions de type "Say on Climate", imposant aux entreprises cotées de consulter leurs actionnaires sur leur stratégie climat.
Députés et sénateurs l'ont finalement retirée durant leurs négociations, allant dans le sens du gouvernement. "On peut toujours rajouter des procédures et espérer un impact positif mais c'est à côté du sujet", estime-t-on à Bercy, ajoutant que "le chemin est déjà fait" grâce à la directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité, en cours de finalisation au niveau européen.
G.Montoya--LGdM