Macron au contact de maires "pris à la gorge" par les prix de l'énergie
"Nos villes sont prises à la gorge" face aux "prix délirants de l'énergie": Emmanuel Macron est allé mercredi au contact des maires réunis à Paris pour les tenter de les rassurer et afficher une relation plus apaisée que par le passé.
Pendant près de quatre heures, le chef de l'Etat a arpenté les allées du Parc des expositions de la Porte de Versailles, multipliant les poignées de mains et les selfies.
"Monsieur le Maire, vous allez bien? Le moral est bon? Ne lâchez rien!", a-t-il lancé aux uns et aux autres dans le Salon des maires, qui se trouve dans un autre pavillon que celui qui accueille le 104e Congrès de l'Association des maires de France (AMF).
Dans ce salon aux 1.200 exposants, beaucoup d'entrepreneurs ont tenté de présenter leurs "solutions innovantes" pour les collectivités, et des édiles ont fait part au président de leurs problèmes.
"On n'arrive pas à boucler le budget", lui dit l'un d'eux.
- "Très très chaud" -
"Le prix de l'énergie, c'est très très chaud", insiste un autre, maire d'une commune de 7.000 habitants parvenu à se frayer un chemin jusqu'au président, qui a tombé la veste. "Il nous faut des moyens financiers", demande-t-il.
A tous, Emmanuel Macron rappelle les "amortisseurs" et "filet de sécurité" déjà annoncés par le gouvernement pour accompagner les territoires face à la flambée des prix de l'énergie. Ainsi que la hausse plus forte que prévu de la dotation globale de fonctionnement (DGF) pour les collectivités territoriales en 2023, à 320 millions d'euros -- qualifiée d'"esbroufe" par le président de l'AMF David Lisnard qui n'y voit qu'un modeste rattrapage.
Le chef de l'Etat vante surtout l'importance des élus, évoquant les violences qu'il peuvent parfois subir: "C'est une mission, un engagement civique, on a besoin d'eux. Ils sont les premiers à faire face à la violence de la société", affirme-t-il.
Cette année, l'Elysée a voulu innover: pas de discours de clôture au congrès de l'AMF pour Emmanuel Macron - il sera prononcé jeudi par la Première ministre Elisabeth Borne - mais cette longue "déambulation".
"Je préfère être à côté des maires et apporter des réponses concrètes", a justifié le président, rappelant qu'il avait prononcé quatre discours à l'AMF lors de son premier quinquennat.
"Dorénavant", ce sera "plutôt" la cheffe du gouvernement qui clôturera le congrès des maires, "sinon, j’ai l’impression de faire toujours le même discours", a-t-il prévenu.
Le choix de la mise en scène a toutefois fait grincer quelques dents, notamment dans l'opposition.
"Il confond le salon des maires et le salon de l’agriculture", déplore le socialiste André Laignel, vice-président de l'AMF.
Marine Le Pen a aussi regretté sur CNews qu'il envoie "la fusible Elisabeth Borne" plutôt que d'offrir aux élus "la considération qu'ils méritent en venant leur apporter les réponses aux questions" qu'il "cherche en réalité à éviter".
- "Vraie décentralisation" -
Il leur a réaffirmé qu'il était favorable à faire "une vraie décentralisation", qui implique selon lui pour que "ça marche" de transférer "ensemble" la "compétence", la "responsabilité", le "pouvoir normatif" et le "financement".
Cette ouverture, initiée en octobre en Mayenne, avait été saluée par le président de l'AMF comme un changement total de discours qui a contribué à apaiser des relations tendues lors du premier quinquennat.
A l'Elysée, on veut au contraire voir dans l'embellie avec les collectivités "le fruit" des politiques initiées depuis cinq ans en faveur d'un accompagnement financier et d'un "retour de l'Etat dans les territoires", plutôt qu'un quelconque tournant.
Le gouvernement a aussi multiplié les gestes ces dernières semaines, avec l'annonce de 1,2 milliard d'euros supplémentaires aux collectivités locales sous forme de prêt pour accélérer la transition écologique et celle de cinq milliards d'ici 2026 pour "redynamiser" le centre de 234 villes moyennes.
Toujours pour rassurer les maires, Emmanuel Macron a pris acte mercredi soir de leur "inquiétude" face à l'objectif "zéro artificialisation nette" (ZAN) des sols, inscrit dans la loi climat de 2021.
Dans un brouhaha désapprobateur, le président a estimé que cela partait "d'une bonne idée", car "on a des territoires mal utilisés". Mais il ne "faut pas qu'on ait une approche uniforme", il faut qu'elle soit "territorialisée et différenciée", a-t-il ajouté, suscitant cette fois les applaudissements des élus.
A.Soto--LGdM