Tensions entre Barnier et les macronistes avant la tentative de censure de la gauche
Avant d'affronter dans l'après-midi une première motion de censure de la gauche vouée à l'échec, Michel Barnier a eu une réunion visiblement tendue mardi avec les députés macronistes sur fond de désaccords sur le projet de budget.
En se rendant à la réunion de groupe des macronistes, l'objectif du Premier ministre était de "fluidifier" les relations avec le principal groupe de la coalition gouvernementale, après des crispations sur les hausses d'impôt ou la ligne à droite toute du ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau.
"Il faut qu'on apprenne à se connaître", a reconnu le chef du gouvernement, se disant "très fier" de compter des macronistes dans son gouvernement, dont Antoine Armand (Economie) et Laurent Saint-Martin (Comptes publics) "qui font un important travail" sur le budget.
Mais, selon un participant, l'ambiance est devenue "délétère" après les questions critiques des députés. "Quand il a repris la parole, il a dit qu'il n'acceptait aucune critique et avait passé l'âge de recevoir des leçons", a-t-il résumé.
"Il est très susceptible" a renchéri un autre, tandis qu'un autre ne se souvenait pas "qu'en sept ans une réunion se soit si mal passée avec un Premier ministre" même si un autre relativisait ces "piques".
- Pas l'unanimité -
Le budget, qui prévoit 60 milliards d'euros d'économies, dont 40 de réduction de dépenses et 20 de hausses d'impôts, ne fait pas l'unanimité dans les rangs des macronistes, qui ont prévu de se réunir en fin de journée pour arbitrer leurs propositions puis de tenir une conférence de presse mercredi.
Avant le budget, qui sera présenté jeudi, le Premier ministre affronte ce mardi une première motion de censure, déposée par la gauche pour protester contre la "négation du résultat" des législatives, mais vouée à l'échec en l'absence de soutien du Rassemblement national.
Olivier Faure (PS) montera à la tribune, autour de 16H30, pour défendre le texte cosigné par la quasi-intégralité de l'alliance de gauche du Nouveau Front populaire.
"Ce sera le moment de vérité. On verra qui s'oppose au gouvernement et qui ne s'oppose pas", résume à l'AFP le premier secrétaire du Parti socialiste, qui compte pointer un "gouvernement tournant le dos au Front populaire mais surtout au Front républicain, et au vote des électeurs".
M. Barnier lui répondra, puis viendra une longue série d'interventions des groupes politiques, avant un vote dont le résultat devrait n'être connu qu'en fin de journée.
- "Tartuffes" -
La chorégraphie est toujours empreinte de solennité, mais elle s'est aussi banalisée depuis 2022. Il s'agira, selon le décompte de l'Assemblée nationale, de la 35e motion de censure du second quinquennat d'Emmanuel Macron.
Michel Barnier devrait y survivre sans trop de difficultés. Même si les 192 députés signataires votaient pour, avec certains indépendants de Liot, la barre des 289 voix semble inatteignable sans les voix des 141 députés de l'alliance RN-Ciotti.
Car les cadres d'extrême droite, Marine Le Pen en tête, n'ont pas l'intention de renverser le gouvernement à ce stade, se satisfaisant d'avoir le couperet entre les mains pour peser sur les choix de l'exécutif.
"On a choisi de ne pas verser dans le chaos, de ne pas censurer immédiatement Michel Barnier pour lui donner la possibilité de développer un projet (...). Si ça ne nous convient pas, on censurera", assure le président-délégué du groupe Sébastien Chenu.
Évoquant des "tartuffes de la censure", le député LFI Manuel Bompard a critiqué une extrême droite qui a promis "la rupture" pendant la campagne législative devenue la "béquille de la continuité du macronisme".
- "Dans la main" du Parlement -
C'est l'une des questions du scrutin : des membres ou ex-membres du camp présidentiel, heurtés par la composition très à droite du gouvernement, iront-ils jusqu'à le censurer ?
Toujours inquiet de certaines pistes budgétaires, comme la réduction du nombre de fonctionnaires, le député MoDem Erwan Balanant n'imagine pourtant "personne à ce stade aller vers une motion de censure". "On ne peut pas se payer le luxe d'une crise politique", abonde Laurent Marcangeli, le chef des députés Horizons.
Stella Dupont, qui a quitté le groupe macroniste sur fond de désaccord avec la composition du gouvernement, ne censurera pas non plus à ce stade en attendant la présentation jeudi des budgets de l'État et de la Sécurité sociale pour 2025.
Le Premier ministre, lui, est bien conscient de marcher sur une corde raide. "Je sais que je suis dans la main du Parlement", a-t-il souligné dimanche.
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L.Flores--LGdM